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Ils sont partis avec leurs animaux

Laf se demande où est l’humanité. L’homme serait-il un loup ? L’animal domestique est un support affectif, un objet d’amour pour son maître. Laf écrit ce pamphlet pour se soulager de sa douleur face à la guerre en Ukraine et rappeler à quel point il aime les humains dans lesquels il a une confiance absolue.



Ils sont partis avec leurs animaux. Ils ne les ont pas abandonnés. C’est ça l’humanité. Je pleure quand je vois cette jeune fille avec ses deux loulous de Poméranie toilettés dans les bras, qui attend un train pour quitter Kiev. Au début de la guerre, ils ont pu partir avec leurs chiens et leurs chats. Regardez cet homme qui porte sur son dos un gros chien qui ne peut plus marcher.


Je n’en peux plus de voir ça. Je sais que les animaux aident leurs propriétaires. Ce sont ces gros chats dans les bras qui tiennent leurs maîtres. En général, je me moque, je veux rire, mais là ! Je suis en régime de silence. J’attends le cessez-le-feu.


Porter un chat, partir avec ses chiens, c’est faire acte de résistance.


Cet homme revient des courses avec un paquet de croquettes « Royal canin » ; il pense à moi ? Qu’aurais-je fait si je m’étais trouvé là ? J’aurais eu trop peur d’être abandonné. J’ai déjà parlé dans ma « Chronique » de mon angoisse d’abandon. Je crois que je n’aurais pas été abandonné. Je me serais réfugié dans le métro, avec des gens, des enfants et plein de chiens et de chats, et moi qui suis claustrophobe !


Je me serais retrouvé sous les bombes. Je ne supporte pas le bruit. Je tremblerais de tout mon corps. Je ne comprends pas pourquoi ça se passe. J’aurais peur que ma maîtresse soit tuée. J’aurais été nourri par ces personnes qui se mettent en danger pour apporter de quoi manger et boire à ces animaux qui restent là, orphelins. Des grands chiens blancs dans un appartement vide regardent par la fenêtre. Des chats se baladent au milieu des obus et se barrent quand ils voient l’ennemi.


Porter un chat, partir avec ses chiens, c’est faire acte de résistance.


Je n’ose pas penser à mes congénères victimes de la guerre. Ceux qu’on n’a pas voulu laisser passer à la frontière, ceux qui n’ont pas été acceptés dans les refuges, ceux qui se sont trouvés sous les bombes, qui sont morts ou qui sont blessés. Moi, mes tympans auraient éclaté, j’en suis sûr. Je suis peut-être une chochotte. J’aurais hurlé si j’avais été touché. Et les animaux sont-ils soignés par des vétérinaires de guerre ? Est-ce qu’on leur donne de l’eau dans la ville assiégée ? J’ai fait des cauchemars. J’ai rêvé de chiens torturés dans les villages devant leurs familles. J’ai rêvé d’animaux domestiques cuisinés dans les villes assiégées, car il n’y a plus rien à manger. Aurais-je été prêt au sacrifice canin ? De toute façon, je ne suis pas bien épais. À mon avis, pas intéressant du tout à être bouffé. Qu’aurais-je fait si j’avais assisté au sacrifice félin ? Le gros matou égorgé devant les enfants pour faire un civet. Je ne sais pas si j’aurais pu le protéger en le faisant fuir devant mon attaque préméditée. Oui, j’aurais fait ça, je lui aurais fait peur. J’en suis sûr, il se serait enfui. Ils ont fait aux animaux ce qu’ils ont fait aux humains. Ni plus, ni moins. Même statut. On dit : « Tué comme un chien », « Sale chien », ni plus, ni moins.


Mais, savez-vous qu’il existe un métier de niche ? Démineur. Oui, parce qu’ils ont farci la terre, les jouets abandonnés, les coffres des voitures, tout ce dont on a besoin et tout ce qui est sacré, l’entrée de la maison et les cadavres, de mines. Merci la mort. Merci la pollution. Tu rentres dans ton village. Ouf ! Et tu sautes sur une mine dans ton jardin que tu es en train de nettoyer, en ramassant toutes les merdes laissées par les envahisseurs. Nous, les animaux, les « pets », surtout les chats et les petits chiens, nous avons la chance de ne pas peser lourd. Il faut peser moins de 5 kg grosso modo, pour que la mine sur laquelle tu marches, ne pense pas à toi. Les humains, toujours très malins comme d’habitude, ont pensé à utiliser les bestioles de moins de 5 kg pour déminer. De préférence les plus futées, les plus loyales à leurs maîtres et les plus légères. Donc des petits chiens. Bravo les minicanins ! Nous rendons aux humains leur amour, à tous ceux qui ne nous ont pas abandonnés. Nous avons aussi nos héros. « Patron », en ukrainien, « Cartouche », en français, est un Jack Russel Terrier combattant spécialisé dans la détection d’explosifs. Il appartient à une équipe de déminage. C’est un adorable petit chien de moins de 5 kg. Il n’a pas intérêt à grossir, sinon, il saute. Il est très, très fort pour sentir l’explosif, mais je crois qu’il n’a pas tout compris, sinon il aurait peur. Il travaille beaucoup. C’était comme moi un chien de chasse à l’odorat affûté. Mikaël, son maître et chef, le considère comme un chien de famille et un soldat. Tu sais qu’il a son Instagram. J’aimerais bien avoir le mien, mais ma maîtresse ne veut pas ; elle a peur qu’on me vole si je suis trop connu. Sur la photo, Patron me ressemble ! J’espère que les Russes ne vont pas me prendre pour ce Russel. Il doit être recherché. Sa tête doit être mise à prix. Et couic, si on le trouve. Interrogatoire dans les sous-sols du KGB. Torture. Tu en as flairé combien de mines, sale chien ? Avoue. Tu en as sauvé combien, tu es un traître à notre nation pacifiante. Et en plus tu t’appelles Russell et Patron, tu te fous de nous. Merci Patron. Tu vas être fusillé d’une balle dans la nuque poilue sans procès. Tu n’as pas le droit de sauver les ennemis. Ce n’est pas parce que ta vie a basculé le 24 février 2022, que tu dois nous déclarer la guerre. Oui, nous savons, tu es en opération spéciale. En Opé. En plus, tu es une mascotte de race. Tu leur portes bonheur, à cette sous-race. Tu aurais mieux fait de mettre ton nez au service des truffes. Patron, n’importe quoi. Nous allons te débaptiser, tu vas voir.


J’ai fait un rêve où on me prenait pour lui. Je lui ressemble vraiment. Mêmes taches brunes et noires sur pelage blanc, même regard langoureux, même énergie à toute épreuve. Seule ma queue est moins courbée, plus traînante. Je n’avais jamais réalisé que je ressemblais à un Russel. Je crois qu’à sa place, j’aurais peur. Je ne suis pas sûr d’avoir la médaille. Et s’il y avait des explosifs qui fassent sauter les petits poids, il y a bien des bombes capables de faire sauter des pays entiers.


Ah la la, le pou a remplacé le virus. Deux ans de virus à couronne qui m’ont terrorisé. J’avais peur d’être porteur quand on me caressait le crâne. J’ai failli être volé pour être mis sur le formulaire de déplacement. Le pou, maintenant, qui, à son habitude, essaie de coloniser. Le pou est très malade, du corps et de la tête. Le pou colonise les honnêtes hommes, ses poils en particulier. Cet insecte parasite, pou de tête, de corps, du pubis appelé morpion, a besoin d’expansion. C’est un super-mâle qui possède deux paires de testicules (couilles en langage viril), ce qui lui permet de féconder 18 femelles à la suite sans repos. C’est pour cela qu’il faut 18 hôtesses de l’air autour de la table, pour que le pou expose sa super-virilité supposée. Voilà comment fatiguer le pou ; mais il se reproduit beaucoup.


Moi, je veux savoir s’il y a un pou du chien. Je connais bien les puces et les tiques. La puce bat le pou. Elle pond 50 œufs par jour. Moi, j’aime me gratter. C’est bizarre, non. Ça me donne conscience de mon corps. Ma maîtresse, n’aimant pas me voir me gratter et sachant repérer les crottes noires de puces dans mes poils, me lave — horreur — et me met des colliers — double horreur. Ouf, a priori, pas de pou du chien.


Désolé de parler de choses graves. La guerre est-elle une chose sérieuse ou de la pure bêtise ? Une chose humaine ? Nous, nous nous bagarrons, certes, pour notre petit territoire. Notre cruauté est inconsciente. Nous ne préméditons pas une occupation et une barbarie. Il paraît que « L’Homme est un loup pour l’homme ». J’ai lu Thomas Hobbes Léviathan 1651 épître dédicatoire « Du citoyen ». L’homme a-t-il la cruauté d’un loup ? « Homo homini lupus » a écrit Plaute dans sa pièce Asinaria » en 212 av. J.-C. J’ai lu « La comédie des ânes ». Ça ne date pas d’hier, la barbarie. Je trouve que c’est très violent pour le loup. Le loup n’est pas du tout le pire ennemi pour son semblable. Au contraire. Premier point : c’est un prédateur des souris et des moutons. Deuxième point : l’homme est un loup, mauvaise nouvelle. Vous voyez qu’il y a une confusion quelque part, et du mensonge. Alors, l’homme est un super-prédateur de son semblable ? Très intelligent de sa part, n’est-ce pas ? Ce n’est pas moi qui suis le loup, c’est l’étranger. C’est l’étranger, le loup, je crois que c’est ça, non ?


J’ai vu passer les deux teckels tenus en laisse à leur sortie de l’usine Azovstal, pleins de dignité. J’ai vu sortir le mini chien, peut-être un chiwawa nain dans un drôle de sac, porté par sa maîtresse, une jeune fille et le gros chien qui suit la file des déterrés. Je sais que les « Morituri te salutant » vont être chassés par une horde de furets furieux et affamés, pour les faire sortir de leur trou, quitte à les gazer ou les enfumer. Ilya a fait son testament en direct et a donné sa vérité. Ave, César !


Je chantonne pour attirer le pou : Pou pou pidou. Je fais ma Norma Jeane dite Marilyn.

J’aime le gimmick du refrain de Wanna Be Loved By you.

Pooh pooh bee do

I wanna be kissed by you

Just you and nobody else but you

Je chante mon amour pour ma maîtresse.

Et je lui pose mes questions : pourquoi y a-t-il des ogres ? Est-ce que les animaux vont au paradis ?

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